Notre territoire français s’illustre par une telle diversité que tout explorateur perdu dans l’un des quatre coins du monde trouvera toujours là-bas une ressemblance avec l’une de nos régions. L’un de ces paysages singuliers demeure notre arc alpin, barrière impénétrable par ses sommets de plus de 4000 mètres et son ascendant sur les esprits et caractères montagnards. Ainsi, sur ce terrain hostile, les établissements urbains qui ont réussi à s’installer et à prospérer se comptent sur les doigts d’une main. Or, au débouché d’un lac enserré par deux massifs sur lesquels elle offre des vues époustouflantes, ouverte sur la plaine vallonnée de l’Albanais, et insufflée de vie par la rivière abondante du Thiou, Annecy en est l’exemple le plus édifiant.

La ville a su profiter de cet atout géographique pour traverser les âges et les Histoires de notre pays dans un périple que l’on peut retracer par ses surnoms successifs. Premièrement, Cité lacustre, les premiers hommes se sont installés en bords de lac il y a plus de 7000 ans, et c’est dans la Plaine des Fins que les Romains fondèrent la ville de Boutae. En tant que véritable structure urbaine placée sur la voie transalpine, entre Milan, Genève et Aix, elle garde encore les traces d’un forum et de thermes caractéristiques de l’époque dans son quartier des Romains, florissant jusqu’aux invasions barbares des Alamans.

Son histoire riche et antique lui offre une dualité lexicologique troublante qui perturbe souvent les nouveaux arrivants. Un premier quartier se nomme Annecy-le-Vieux, au Nord de la Plaine des Fins, simple lieu de passage pour l’Histoire puisqu’il ne domine que quelques siècles, mais trouve une grande importance, portant les racines du nom actuel de la ville. Une villa gallo-romaine du nom d’Anniciaca fut à l’origine de ce nouveau fleurissement démographique à flanc de coteau, et donna son appellation définitive aux implantations citadines suivantes.

De retour au sud sur les rives du Thiou, Annecy-le-Neuf apparaît pour la première fois dans les écrits au XIIe siècle, prenant le pas sur sa sœur plus archaïque et annonce les heures fastes de la grandeur médiévale d’Annecy, portant aujourd’hui le nom de Vieil Annecy, qui trouble ainsi les passants. D’abord résidence princière des Comtes de Genève, embellie par les Ducs de Savoie qui en prendront possession, elle devient la Rome des Alpes, lorsque les évêques fuient le calvinisme de Genève, pour être la capitale épiscopale de Saint François de Sales.

Son retour éphémère sous les couleurs françaises naissantes à l’heure de la Révolution lui offriront l’opportunité de prendre un essor industriel sans précédent dans le textile, devenant cette fois l’atelier des Alpes dans le royaume de Piémont-Sardaigne. La dernière page de son histoire fut tournée il y a maintenant 150 ans, lorsqu’elle redevint française, et que les rails du train à vapeur l’atteignent pour ouvrir le chapitre du tourisme. Dès lors, c’est le surnom de Venise des Alpes qu’elle prendra, les aristocrates puis les classes plus populaires découvrant ses ruelles, traboules et canaux lacustres, qui font sa renommée jusqu’à nos jours.

Cité lacustre, Boutae, La Neuve puis La Vieille, Rome, Atelier, et enfin Venise des Alpes, cette pléthore étymologique reflète la richesse du patrimoine d’Annecy. Elle fut ainsi la première ville de France à posséder l’appellation, une de plus, de Ville d’Art et d’Histoire, car elle offre une promenade unique à travers le temps, dans un cadre environnemental exceptionnel. Son dernier titre n’est que le résultat de cet héritage multi-séculaire, décerné par tous ceux qui sont tombés sous son charme : Ville la plus romantique de France. Une escapade sur le Pont des Amours, avec en toile de fond le Massif des Bornes s’élevant au dessus des eaux bleutées du lac, à l‘entrée des trésors de la vieille ville saura vous convaincre sans difficulté.